Modification du Règlement de l’Assemblée nationale

 

Proposition de résolution tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale

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Intervention de Mme Yaël BRAUN-PIVET, 

présidente de la commission des lois constitutionnelles, 

de la législation et de l’administration générale de la République

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Discussion générale – séance du lundi 27 mai 2019

 

Seul le prononcé fait foi

 

Monsieur le Président,

Monsieur le rapporteur,

Mes chers collègues,

 

Chacun l’aura compris, c’est un texte particulier que nous examinons aujourd’hui.

Un texte particulier par sa nature. Il est question de la règle de nos travaux, de nos délibérations, d’une certaine façon de la règle de la démocratie. Ces règles nous appartiennent, et même si le Conseil Constitutionnel sera appelé à en connaitre, nous sommes seuls à délibérer, le banc des ministres n’est pas occupé,  et il n’y a pas de navette. Ce n’est pas rien !

Un texte particulier par son auteur, le Président de l’Assemblée nationale, qui l’a préparé durant des mois en réunissant à intervalles réguliers les présidents de nos groupes respectifs. Je souscris à la méthode qu’il nous propose : « Sans attendre l’évolution du cadre constitutionnel, nous devons utiliser toutes les marges de manœuvre dont nous disposons », avez-vous écrit Monsieur le Président. C’est d’autant plus justifié que l’on peut déjà faire beaucoup au travers du règlement et notamment corriger certains des dysfonctionnements que nous constatons au quotidien lors des délibérations.

Particulier par son rapporteur, Sylvain Waserman, vice-Président de notre Assemblée, que je remercie d’avoir accepté d’accompagner avec talent nos travaux au nom de la commission des Lois.

Ce texte est entre nos mains. Idéalement, nos choix seraient consensuels… Je n’ignore pas que ce consensus semble hors de notre portée : les motions de procédure qui ont été déposées et les 800 amendements à examiner semblent le confirmer. Pas de consensus donc, pas davantage qu’en 2009 notamment, et pourtant je demeure persuadée que des accords, au moins partiels, sont possibles et qu’il nous faut inlassablement les rechercher.

J’observe, en effet, et c’est un préalable, que chacun peut se retrouver dans les quatre objectifs proposés à notre réflexion, qui ont été rappelés par notre rapporteur.

Premier objectif, réformer nos méthodes de travail : qui ici peut se satisfaire de la situation actuelle ? Nous légiférons, certes, et bien je le crois, mais la fabrique de la loi, entravée par des expressions trop répétitives et un nombre d’amendements qui atteint des sommets, peut gagner en efficacité.

Deuxième objectif, renforcer les droits de l’opposition : Il n’y a pas de Parlement fort lorsque l’opposition n’est pas respectée. En tout état de cause le renforcement des droits de l’opposition en matière de contrôle est le corolaire de l’encadrement de la procédure législative.

Troisième objectif, conforter le cadre déontologique dans lequel les députés exercent leur mandat : la déontologie est un impératif commun, pour que les fautes de quelques-uns ne rejaillissent pas sur le plus grand nombre, pour ne pas nourrir les populismes… nous avons commencé la législature avec les « lois confiance », nous pouvons avec ce texte poursuivre ce mouvement nécessaire.

Quatrième objectif, aménager la procédure des pétitions, nous sommes tous à la recherche de nouveaux moyens pour améliorer la participation citoyenne.

De fait, en commission, nous avons su, autour de ces quatre objectifs, dialoguer, nous écouter. Quatre réunions, deux mercredis, 14 heures d’échanges : c’était nécessaire.

Lorsque ce fut opportun nous avons trouvé les moyens de prolonger nos échanges de façon informelle sur d’autres sujets, sur les jours et les horaires de séance ou la définition des groupes d’opposition et des groupes minoritaires notamment.

A ce stade, je demeure persuadée qu’au-delà de la lettre du règlement nous pouvons également par la pratique, la concertation et le dialogue beaucoup faire pour mieux organiser nos travaux. Je sais que chacune de nos commissions innove, adapte ses méthodes de travail, selon ses traditions, ses spécificités ou encore ses membres.

En ce qui concerne la commission des Lois, notre bureau, qui s’est déjà davantage réuni en deux ans que sous la précédente législature, a engagé des actions collectives telles que nos travaux sur la détention ou nos nombreuses visites de terrain. Ce choix d’aborder les sujets collectivement et par un prisme très concret nous a permis d’anticiper autant que d’approfondir. Nos débats en ont été plus riches, plus précis, plus sereins aussi. Nous avons décidé d’ouvrir la commission, en siégeant hors les murs comme à la prison de Fresnes ou en allant à la rencontre d’autres institutions comme nous le ferons bientôt à Strasbourg pour dialoguer avec la Cour européenne des droits de l’Homme. Car des travaux efficaces, ce sont, au-delà de leur seule organisation, des travaux dont les effets seront concrets et correspondront aux réalités du terrain et aux besoins de nos concitoyens.

Nous avons su mettre en place de nombreux instruments qu’il est à présent proposé d’inscrire dans le Règlement : la répartition des postes et des rapports à la proportionnelle, la nomination très en amont des rapporteurs d’application, la désignation d’un rapporteur d’opposition pour les auditions préalables à certaines nominations, le suivi des ordonnances…

Avec le concours de chacun nous avons fait de la commission une instance où il est possible de travailler en bonne intelligence. Les représentants des députés non-inscrits ont pu, sans attendre la réforme du Règlement, s’y exprimer lorsqu’ils le souhaitaient.

A nous désormais de faire œuvre commune. N’ayons pas peur de la réforme, elle est nécessaire. L’unanimité serait inaccessible ? Recherchons le plus large accord possible.

Je vous remercie.

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