4 mars 2024 Le Congrès du Parlement a inscrit l'interruption volontaire de grossesse dans la Constitution

Discours prononcé au Congrès du Parlement à Versailles le 4 mars 2024 : 

"Pour la première fois de notre histoire, le Congrès du Parlement est présidé par une femme. 

En venant ouvrir cette séance, en remontant avec la solennité qui s’attache à ces lieux la galerie des bustes – des bustes d’hommes, exclusivement –, j’ai pensé à Simone Veil, elle qui, le 26 novembre 1974, dans l’hémicycle du Palais-Bourbon, s’excusait de partager sa conviction de femme devant une assemblée presque exclusivement composée d’hommes.

À son époque, en effet, on ne comptait que treize femmes parmi les députés, 7 parmi les sénateurs. En contemplant aujourd’hui le Parlement réuni en Congrès, je constate avec vous que la place des femmes a changé, parce que la France a changé, même s’il reste beaucoup à faire pour atteindre la parité vraie. 

Oui, les temps ont changé, l’égalité a progressé, la parole s’est libérée.  

Oui, Hommes et femmes ici réunis, élus de la Nation, nous nous apprêtons à faire franchir à notre pays, ensemble, un nouveau pas sur le chemin des droits des femmes. 

Vous comprendrez, alors, que je sois fière de présider le Congrès du Parlement, au château de Versailles, à cet instant précis où la liberté défendue par Simone Veil va être gravée dans le marbre de notre Constitution. 

Je suis fière de pouvoir rendre hommage, ici, à toutes celles qui ont écrit, agi, et aussi à celles qui se battent encore au quotidien, près d’ici ou loin de nous, pour que nous escaladions, mètre par mètre, la paroi escarpée menant à l’égalité entre les femmes et les hommes. 

Car c’est bien une paroi que nous avons à gravir. Paroi dont l'ascension reste longue, laborieuse, et trop encore incertaine. Et nous savons, toutes et tous, qu’il suffit d’un instant pour chuter, pour que tout ce que l’on croyait acquis ne le soit plus. 

Alors oui, nous avons progressé. Mais il reste tant à faire sur le terrain de l’égalité, et les violences faites aux femmes sont encore, hélas, une tragédie du quotidien. 

Cette nouvelle avancée, il suffisait d’écouter les femmes, dans toute leur diversité, quelle que soit leur condition sociale, pour se convaincre de la nécessité de s’y atteler. 

Il suffisait de regarder le monde pour se convaincre de l’opportunité de s’y atteler : les droits de la femme ne sont-ils pas les premiers à être menacés lorsque le populisme ou l’autoritarisme s’empare du pouvoir ou que les partisans de l’obscurantisme prétendent nous imposer un ordre moral toujours rétrograde ? 

Alors que le monde est secoué de tant de crises, notre pays s’attache à renforcer la garantie des droits.  

La France serait- elle à contre-courant ?  

Non, elle est à l’avant-garde. Elle est à sa place. C’est là sa mission et elle est attendue. 

Aux femmes de France, nous disons que nous ne reculerons jamais.  

Aux femmes du monde, nous disons que nous les soutiendrons et que nous avancerons toujours à leurs côtés. 

Je suis fière, nous serons fiers, demain, de ce Congrès visant à proclamer que la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse fait désormais partie de notre loi fondamentale.  

Nous sommes dans notre rôle. Le Parlement a montré, une fois de plus, que, lorsqu’il en a la volonté, il sait transcender les clivages politiques pour emprunter le chemin du progrès. Retenons cette leçon, appuyons-nous sur la vitalité de la démocratie parlementaire ! Le constituant vient consacrer son œuvre, il le fait avec gravité, conformément à la seule procédure qui permette de réviser la Constitution, celle prévue à son article 89. 

L’heure est venue de nous prononcer. 

L’heure est venue d’exercer ce pouvoir constituant. 

Pour nous, pour la Nation, pour toutes les femmes, pour toutes nos filles, en France et à travers le monde."

La texte a été adopté à 780 voix Pour. J'ai ensuite procédé au scellement de la loi constitutionnelle, en présence de Gérard Larcher, Président du Sénat, de Gabriel Attal, Premier ministre, d'Eric Dupond-Moretti garde des Sceaux, d'Aurore Bergé, Ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les Discriminations et de Marie Lebec, Ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des Relations avec le Parlement.