Projet de loi Justice : mon discours lors de la discussion générale

 

 

Projet de loi de programmation 2019-2022 et de réforme de la justice et de renforcement de l’organisation des juridictions

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Intervention de Mme Yaël BRAUN-PIVET, 

présidente de la commission des lois constitutionnelles, 

de la législation et de l’administration générale de la République

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Discussion générale – séance du lundi 19 novembre 2018

Seul le prononcé fait foi

 

 

Monsieur le Président,

Madame la garde des Sceaux,

Madame la Présidente de la délégation aux droits des femmes,

Madame et Messieurs les rapporteurs et rapporteurs pour avis,

Mes chers collègues,

« Complexe, inaccessible, déroutant… » Tels étaient les mots qu’il m’arrivait d’entendre aux Restos du Cœur lorsque j’œuvrais en faveur de  l’accès à la justice pour les plus démunis. De cet engagement, Madame la Ministre, j’ai retiré cette même conviction qui, je le crois, vous amène aujourd’hui à nous présenter ce projet de réforme : plus d’humanité, plus de proximité, plus d’efficacité sont aujourd’hui indispensables pour rapprocher encore les citoyens de la justice de la République.

Ce pourquoi nous nous engageons aujourd’hui est une transformation en profondeur pour une justice au service du justiciable, une justice qui protège la société.

Ces enjeux méritent que nous avancions ensemble. Que nous travaillions ensemble.

Ce fut le cas en commission. Pour examiner les deux textes que vous nous proposez, Madame la Ministre, nous avons mené 9 réunions, 33 heures d’échanges, en votre présence. Près de mille amendements ont été examinés, dont 350 adoptés. Ce débat, responsable et apaisé, fut le terme – provisoire – d’un long chemin fait de concertations et de réflexion.

Il y eut, pour ce qui est du Gouvernement, les Chantiers de la Justice, dont les propositions constituent le socle solide et novateur de ce projet. Et, en ce qui nous concerne, députés de tous bords, plusieurs missions d’informations : sur les fouilles en détention, les fichiers mis à la disposition des forces de sécurité, la justice des mineurs, les droits fondamentaux des personnes protégées, et l’aide juridictionnelle.

Il y eut aussi nos travaux sur la détention, qui comme vous le savez, me tiennent particulièrement à cœur. Souvenez-vous, il y a un peu plus d’un an, le 6 novembre 2017, les commissaires aux lois se sont rendus dans plusieurs dizaines d’établissements pénitentiaires sur l’ensemble du territoire français. Malgré la diversité des situations que nous avons pu observer, nous avons rapidement formulé un diagnostic commun : il était urgent d’apporter des réponses plurielles aux difficultés du monde carcéral. Il était nécessaire d’apporter notre soutien et notre reconnaissance à l’administration pénitentiaire, qui n’a pas toujours bénéficié – c’est un euphémisme – de l’attention qu’elle est en droit d’attendre.

A ce diagnostic commun, répond une approche commune conduite à huit mains avec trois de mes vice-présidents Stéphane Mazars, Laurence Vichnievsky et Philippe Gosselin, approche qui a engagé l’ensemble des commissaires aux Lois. Elle nous a permis de valoriser nos convergences, plutôt que de faire état de nos divergences. « Un travail collectif », pour reprendre les mots de Philippe Gosselin, transpartisan, pragmatique, ponctué de très nombreuses visites de terrain et parachevé, le 17 octobre, par une réunion « hors les murs » de la commission des Lois, au centre pénitentiaire de Fresnes.

Diagnostic commun, approche commune. Et premiers fruits que nous récoltons ensemble aujourd’hui.

Nous disposerons désormais d’un panel d’établissements à sécurité différenciée, du plus sécurisé au plus allégé, adapté à tous les types de profils. La construction de nouveaux établissements sera plus systématiquement pensée en fonction des objectifs qui leur sont assignés. L’évaluation des dispositifs de prise en charge sera renforcée pour mieux mesurer l’efficacité de nos politiques pénales. La situation des personnes détenues souffrant de troubles psychiatriques sera mieux prise en compte.

Ce sont, je crois, des avancées dont nous pouvons nous féliciter, alors que le sujet de la prison a plus souvent fait l’objet de crispations que de consensus.

« Repenser la prison pour mieux réinsérer ». Voilà l’objectif que nous nous sommes fixé. En œuvrant ainsi pour une meilleure réinsertion, nous ferons régresser la récidive et nous protégerons davantage la société. Nous le devons aux Français. C’est pour cela que lorsque les portes de la prison s’ouvrent, il faut veiller à ce que les autres portes ne se referment pas.

Je sais que notre travail se poursuivra dans le même climat apaisé qui l’a toujours caractérisé. Je sais qu’ensemble nous suivrons sa mise en œuvre et assurerons son évaluation, et je m’en réjouis.

Ce succès n’est pas un hasard. N’est-ce pas un peu dans la démarche collective qui fut la nôtre que l’on doit rechercher ses origines ? N’y a-t-il pas une leçon à retenir, pour nous qui recherchons les moyens d’améliorer la qualité du travail parlementaire ?

Je souhaite pour terminer, Madame la ministre, vous adresser mes remerciements, vous qui avez été à notre écoute tout au long de ces travaux. Je souhaite remercier aussi, bien sûr, nos deux rapporteurs. Mes remerciements vont aussi à mes vice-présidents ainsi qu’à l’ensemble des commissaires aux Lois pour leur investissement. Je souhaite enfin rendre hommage à la Justice et à ses acteurs, auxquels nous apportons une programmation budgétaire ambitieuse et des moyens renouvelés.

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